LA DÉBAUCHE TOKYOÏTE

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Après en avoir lu une description sympathique dans le Lonely Planet, Morgane nous a proposé de sortir faire un tour du côté des bars du Golden Gai. Le Golden Gai, c’est une série de mini-ruelles plutôt sombres remplies de bars en tout genre. Marie m’avait parlé de cet endroit, soulignant le fait que sa mère jugeait cet endroit plutôt mal famé. C’est vrai qu’il n’est pas situé n’importe où : en plein dans le Kabukichô de Shinjuku, c’est-à-dire dans le quartier de la débauche. La description de Wikipédia est assez explicite : « quartier chaud le plus célèbre de Tokyo, avec notamment des love hotel, des strip shows et des lieux de prostitution » / « la capitale du sexe » / « quartier des Yakuzas, la pègre japonaise ».

DSC02027Le décor est donc planté. Sur place, pendant qu’on essaye de trouver notre chemin (à savoir le bar « La Jetée », pour lequel notre quête fut vaine) on constate la présence flippante de nombreux bars à hosts et à hôtesses, lieux au concept plutôt pervers : il s’agit de choisir la personne qui va nous tenir « compagnie » en fonction de son physique, et de boire des verres avec elle (bien sûr le but de cette personne est de faire boire un maximum le client, donc de le faire payer). La photo ci-contre illustre ce genre de bar à hosts, le garçon qui doit tenir compagnie à la femme en manque d’attention doit être choisi parmi cette sélection. Urg.

Bien entendu, de tels endroits ne sont pas le but de notre excursion. Après avoir erré entre les bâtiments voués à la débauche, nous finissons par atterrir dans une série de ruelles sombres : le Golden Gai. Chaque bar a l’air d’avoir son propre caractère. Certains sont vraiment minuscules, avec cinq places uniquement… il vaut mieux être un habitué. Après avoir fait un premier tour, nous choisissons d’aller nous poser dans un bar nommé « Flamenco Nana », qui, comme le nom le suggère, a pour thème le flamenco.

DSC02030Une des ruelles du Golden Gai

Ce fut un excellent choix. L’ambiance du bar était très particulière, avec six personnes (dont nous, quatre Françaises) dans environ 12m², des morceaux de flamenco qui sortaient du haut-parleur, des murs entièrement recouverts de signatures, l’odeur étrange de la cigarette du barman, un plafond magique peint dans des couleurs ocre et sombres… Le barman, En de son prénom, nous raconte l’histoire de ce bar, qui appartenait il y a longtemps à Nana, une Japonaise danseuse et chanteuse de flamenco. Les signatures qui recouvrent tous les recoins du bar (y compris la clim, le haut-parleur et les lampes) sont celles de tous les Espagnols qui sont passés par ce bar. Parfois des gens viennent ici se rassembler pour jouer de la guitare, et chanter en coeur dans cet espace pourtant si restreint. En explique qu’il joue de la guitare tous les 7 juillet en l’honneur de la défunte Nana, puisque « Nana » signifie entre autres « sept » en japonais.

Nous ne voyons pas le temps passer. La faim commence à gagner certaines d’entre nous. Nous quittons donc le Flamenco Nana et partons à la recherche d’un restaurant de Ramen conseillé par le Lonely Planet, que nous trouvons après avoir erré longuement et désespérément dans Shinjuku. La nuit, ce quartier est encore plus animé qu’en plein jour : des millions de jeunes se baladent en groupe, beaucoup moins timides qu’à l’ordinaire. Les bars, salles de jeu, karaokés, et restaurants sont tous illuminés et animés. L’ambiance sonore est assez difficile à décrire, entre rires, hurlements, musiques criardes, … Mais comme l’a dit mon professeur de Sociology of Japanese Culture and Society, « dans les villes comme Tokyo, il y a de l’ordre dans le chaos ».

SURVIVRE AU FESTIVAL DE WASEDA

C’est l’évènement de l’année. Le « Waseda-sai » (festival de Waseda) rassemble chaque année une quantité infinie de personnes sur le campus, avec des stands plus ou moins improbables et des spectacles en plein air. Marie m’avait prévenue : « Il paraît qu’on peut à peine marcher ». La foule serait donc encore plus dense qu’un dimanche à Harajuku ? OUI !

Nous avons donné rendez-vous en bas de mon temple à deux locaux pour nous accompagner pendant cette épreuve : Amane et Seira. Et c’est parti, nous nous trouvons un chemin dans la foule déjà compacte. Le campus est métamorphosé : en dehors de la population multipliée par 10 000, de la musique résonne à plein tube, des gens hurlent pour nous attirer à leurs stands, des odeurs de nourritures s’échappent des petites échoppes en bord de chemin… c’est géant. Sans compter la scène en plein air sur laquelle défilent non-stop divers groupes de danse.

DSC02004Le campus en suractivité, avec au milieu la statue du fondateur, imperturbable

DSC02005Une équipe de gagnants. De gauche à droite : Seira, Amane, Marie

On décide de commencer soft en allant s’attabler à un stand qui fait café, et qui propose gratuitement des thés assez inconnus. J’ai choisi un thé des Philippines (en hommage à mes bananes que je mange quotidiennement), qui était fort bon. Nous continuons ensuite d’errer plus ou moins sans but, en atterrissant aléatoirement dans un stand de gaufres, sur des tables d’un bâtiment obscur, dans une rue vide pour retrouver une Chinoise, dans une scène en plein air avec une performance de break-dance et un dinosaure caché dans le public, dans un stand de « nourriture égyptienne », … Finalement, après les visites d’un stand inutile hispanico-braderie(?!) et d’un stand sur le Népal, nous nous posons sur des marches (juste devant un humain à la tête de robot) pour permettre à mes camarades carnivores de manger leur viande d’intestin/utérus/estomac (au choix), pendant que je sirote tranquillement mon chocolat chaud à la banane.

L’heure de la danse indienne arrive ! J’étais venue en partie pour ça, pour aller voir la performance d’une gentille Japonaise, Yumi [Flashback : j’ai mangé avec Yumi mercredi dernier, et j’ai découvert qu’elle faisait partie de la troupe de danse indienne de la fac. Passé le choc de découvrir que l’Inde est représentée ici, je lui ai naturellement dit qu’il s’agissait d’une de mes passions, ce à quoi elle a répondu que je devais aller voir le spectacle de samedi, et qu’après j’avais intérêt à venir aux sessions danse pour leur apprendre des trucs, « parce qu’on n’a pas trouvé d’étudiante indienne ici »]. La performance fut assez courte, et enchaînée bizarrement avec des gens habillés en latino dansant sur du Shakira. Mais c’était sympa ! Ensuite est arrivée ma danse préférée depuis que je suis au Japon : la danse du pêcheur ! (encore désolée pour les têtes du premier plan dans la vidéo qui suit, mais malheureusement je ne fais toujours pas 1m80)

 

 

On décide ensuite d’aller dans un café (« Le chat noir ») qui vend des glaces de malade à prix raisonnables. Et c’est parti pour un sudae géant au chocolat. Merci la vie. Oui, on avait besoin de reprendre des forces, parce que la suite du programme est… un karaoké !

Par rapport au premier karaoké que j’ai expérimenté, celui-là était plus petit et moins moderne, mais beaucoup moins cher, et puis je m’y suis nettement plus amusée (la première fois, les 3/4 des gens présents m’étaient inconnus, alors…). Les deux heures sont passées si vite ! Au programme : Bacstreet Boys, Shakira, Rasputin, Aux Champs Elysées, Destiny’s Child, Police, Ricky Martin… j’ai également tenté du rap chinois (échec). Et bien sûr, les tubes de pop japonaise ne sont pas passés à la trappe. J’ai donné tout ce que je pouvais sur mes deux chansons du moment, révélées grâce à Marie bien entendu (cliquez sur ce lien si vous osez : link)(ouais, j’ai un peu honte). Suite à une réclamation de Marie, et également parce que je ne suis plus à ça près en ce qui concerne mon intégrité, voici également la seconde chanson, que vous connaissez déjà si vous avez lu l’article « To be or not to be radioactive » : link .

AUTRES PHOTOS DE LA JOURNEE

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Un exemple de danseurs costumés // L’Egypte, c’est comme les bananes : ça me poursuit

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Attention à ne pas se perdre // Et là, un drapeau de la Corée du Nord et un drapeau communiste qui se baladent.

VIDÉOS BONUS DE LA VIE DU CAMPUS

Depuis que j’ai aperçu pour la première fois des pom-pom girls ici à l’université de Waseda, je suis sous le choc. En France, c’est difficile d’imaginer ce genre de choses dans « l’enseignement supérieur ». Bon, certes, il y a des poms-poms à Sciences Po, mais… ce n’est pas vraiment la même chose. Celles de mon campus sont vraiment des « cheerleaders » à fond, elles ne plaisantent pas.

Voilà en vidéo pour que vous vous rendiez compte de l’ampleur du truc. Désolée pour la piètre qualité de la vidéo, pour les tête devant et pour l’angle un peu naze. Mais c’est l’ambiance qui compte. Là elles étaient en train de faire une démonstration de ce qu’elles vont faire au festival de Waseda ce week-end.

 

 

De temps en temps j’admire leur efficacité et leurs performances impeccables, mais souvent leur hystérie et leurs sourires figés me font peur…

Les poms-poms au masculin existent aussi ! Malheureusement ma vidéo était trop mauvaise pour que j’ose la publier.

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Voici maintenant une autre vidéo prise la même journée : des jeunes hommes Japonais qui ont décidé de s’éclater sur de la pop mielleuse. Je m’excuse encore pour ces têtes au premier plan. Mais regardez la vidéo jusqu’à la fin, le meilleur arrive quand je zoom sur le fou tout à droite, qui mine de rien est maxi doué dans le domaine « imitation de pétasse de J-Pop ».

 

 

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Et pour finir, cette vidéo arrive un peu tard, mais voici un aperçu de l’ambiance du match de baseball de dimanche dernier. On y retrouve nos amies les poms-poms. Bon, en fait le match n’avait pas encore commencé (le personnel peaufinait encore le terrain). Merci Marie pour le mot vulgaire qu’on entend dans la vidéo ! x)

 

LE MATCH DU SIÈCLE

Match de quoi, football ou rugby ? Ah non non non, ici le sport national c’est le baseball ! Et donc hier j’ai eu l’honneur d’assister au « Soukei-sen », on match traditionnel qui oppose deux grandes universités rivales de la ville : Waseda (ma fac) et Keio.

L’association qui nous a vendu les billets a fixé un rendez-vous quelque part dans Tokyo à 8h. Seulement, le match commençait à 13h… j’étais bien curieuse de savoir pourquoi on nous faisait venir autant en avance. En fait, il y avait déjà pas mal de monde qui attendait. Mais surtout, il a fallu préparer l’ambiance avec tout un programme : démonstrations de pom-pom girls, chants de supporters, lever de drapeau, hymne de la fac, distribution de packs supporters (serviettes avec le nom de la fac, cônes en carton pour faire du bruit). Bien que leur prestation fut assez impressionnante, j’ai trouvé les pom-pom girls plutôt effrayantes : faux sourire figé, maquillage à outrance, voix suraiguë…

Quelque chose m’a impressionnée : le respect de l’adversaire, le fair-play. Les pom-pom girls adverses et leurs compagnons masculins qui hurlent en bougeant des bras sont venus faire un show dans notre tribune, accompagnés de la mascotte de Keio. Ils ont été bien applaudis, avec de nombreux encouragements. J’essayais d’imaginer ça dans une rencontre sportive en France… hum. De la même manière, lorsque l’équipe adverse a chanté son  hymne, nous avons du nous lever et applaudir en signe de respect, et pareil pour eux.

DSC01972Le personnel prépare le terrain, pendant que l’ambiance commence à monter dans les gradins

Le match a finalement été avancé, et a commencé à midi. Re pom-pom girls : elles dansent presque sans s’arrêter, et certaines d’entre elles brandissent des panneaux sur lesquels sont indiqués les paroles des chants de supporters. Quoi, le match a commencé ? Dans la folie générale, je n’avais pas remarqué que le « coup d’envoi » avait été donné. Je me tourne vers Marie, en quête d’explications sur les règles mystérieuses de ce sport. Mon regard fait des allers-retours entre le match, le panneau d’affichage… je commence à saisir le truc. Et tout le monde chante, « allez Sugiyama, allez ! » [Sugiyama étant le seul nom de joueur que j’ai vraiment retenu, j’appellerai ici tous les joueurs Sugiyama], et autres chansons que j’avais du mal à comprendre. Ça y est, j’ai des frissons quand Sugiyama frappe la balle avec brio, et je hurle en même temps que les supporters de Waseda quand la balle touche le sol avant d’avoir été rattrapée.

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On marque un point ! On se lève tous, on se prend par les épaules, et on chante l’hyme de Waseda. Dans les tribunes, les serviettes tournoient, les chants ne s’arrêtent jamais… et le jeu non plus d’ailleurs (qui aura duré 3h et des poussières). Mais ça passe plutôt vite, c’est vraiment prenant une fois qu’on comprend à peu près. J’arrive même à savoir sans regarder le tableau quand est-ce que Sukiyama fait un strike, ou quand est-ce qu’il est out (et croyez-moi, c’était du grand progrès)

Dernier tour de jeu pour Waseda : grâce à Sugiyama l’équipe marque un point, c’est l’euphorie ! On rechante pour la quatrième fois l’hymne de Waseda. Dernier tour de jeu de Keio, ils ne marquent pas de point (aha).

Le score final est donc de 4-2 pour Waseda. On rechante les hymnes mutuelles, en levant le poing au rythme du tambour. On range les drapeaux, le tout dans un silence très cérémonieux. Les équipes s’inclinent.

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Ce fut une grande expérience pour mon premier match de baseball. Malgré le froid ambiant et la fatigue de m’être levée tôt, j’étais vraiment à fond dedans. Et j’ai également vu de près toute l’énergie que mettent les Japonais à supporter leur équipe, ne serait-ce qu’au niveau de l’organisation (pom-pom girls, chants, placement dans les gradins, …). C’est assez bluffant.

 

Quand le match se finit, il n’est pas très tard, alors Marie et moi on atterrit à Harajuku, normal. Comme c’est Halloween, il y a beaucoup de choses plus étranges que d’habitude, comme ces deux personnes derrière nous drapées dans du noir, avec un masque vénitien sur le visage (ça faisait très peur). Ou cette jeune femme avec des faux-cils à pois rose (?!). Bref, le but de notre soirée est d’arriver au Sweets Paradise avec Amane, un ami de Marie de notre fac qui apprend le français. Le Sweets Paradise, c’est un endroit où pour moins de 15€ on peut manger tout ce qu’on veut pendant une heure et demie, et dans le « tout ce qu’on veut », il y a : riz au curry, salade de pâtes, fontaine de chocolat, innombrables gâteaux patissiers, salade de fruits, vrai jus d’orange (c’est important le « vrai »),… j’ai donc fait un repas constitué d’un peu de pâtes, mais surtout de salade de fruits et de parts de gâteau au chocolat.

Encore un dimanche très productif ! Même pas besoin de tartine de Nutella pour bien terminer la journée. 🙂

 

[EDIT : grâce à Marie je viens de corriger mon erreur, j’avais écrit « SuKiyama » partout au lieu de « SuGiyama ». Shame on me]

TEMPLE ET CRIMINELS DE GUERRE

Le temple de Yasukuni est seulement à 10mn en métro de Waseda, ce qui nous as fait faire notre petite sortie du jour à Marie et à moi. C’est Yuma qui nous a parlé de ce sanctuaire [Yuma = le Japonais qui était à Sciences po Lille avec Marie l’an dernier et qui a un niveau de français juste hallucinant], en soulignant l’aspect controversé du lieu. En effet, Yasukuni-jinja rend mémoire à tous les Japonais morts pour le pays de 1868 à 1951. Le problème, c’est que parmi ces soldats il y a 14 criminels de guerre de la Seconde Guerre Mondiale…

Wikipédia m’informe aussi que ce temple est souvent mal vu par des pays anciennement colonisés par le Japon, qui y voient une glorification de son passé. Le musée présent dans l’enceinte du sanctuaire est en particulier critiqué à cause de son ton jugé nationaliste, et à cause de l’impasse qui est faite sur les crimes de guerre commis par l’armée japonaise.

A chaque fois qu’un premier ministre ou autre personnalité politique se rend dans ce lieu plutôt nationaliste, ça suscite une polémique, non seulement au Japon mais également dans les pays asiatiques sensibles à ce sujet.

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Le temple à droite, et le musée à gauche

Bon, notre visite fut assez rapide, comme toute autre visite de temple. Le temple en lui-même est plutôt beau, mais ses grandes allées et la façon dont il est agencé dégagent quelque chose de carré, presque autoritaire. Cependant, nous n’avons pas du tout pu saisir la dimension nationaliste du lieu, sûrement parce que nous ne sommes pas allées au musée Yushukan (qui était fermé de toute façon). Mais aller visiter ce musée est maintenant casé dans la liste de mes choses à faire ici-bas.

 

Et comme cet article n’est pas très drôle (oui oui, ça me préoccupe beaucoup de mettre un peu de fun dans mes articles), vous avez le droit à une photo bonus suivie d’explications incontournables (non désolée pas de pop japonaise cette fois – vous êtes tristes, avouez) :

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Il s’agit de moi avec un poncho (mais le poncho n’est pas très important) devant un exemple du tri/recyclage à la japonaise. « Ils sont pire que les Allemands ! » a suggéré Marie. Oui, vraiment. J’ai eu une leçon sur ce recyclage lors d’un de mes nombreux cours de Japonais, mais je n’ai toujours pas compris. Entre les déchets « combustibles », les « non-combustibles », les « recyclables » et autres, je me perds. Et en plus, il n’y a pas les mêmes divisions partout, ça dépend du lieu (ma cité U, le bâtiment 4 de la fac, le bâtiment 11 de la fac, etc…). En fait, je comprends seulement « ペット ボトル » [« petto botoru »… ou PET bottles], qui sert donc à mettre nos bouteilles en plastique. Pour le reste, je triais soigneusement cartons et papiers de magazines séparement, mais je crois que ça ne sert à rien… et les briques de lait restent une préoccupation. Un jour, je comprendrai. Pour l’instant, j’ai appris la phrase « Moeru gomi desu ka ? » [« est-ce que c’est un déchet combustible ? »]. Utile. Mais au moins, je ne fais pas l’erreur de débutant de certaines à la cuisine, à savoir de mettre les épluchures de carottes and co dans le « recyclable ». Tssss, ça c’est du moeru gomi voyons.

"TU PARLES TRÈS BIEN FRANÇAIS !"

Hier soir, les Français étaient les stars : il s’agissait d’une fête dédiée aux « French-speakers » de mon département à Waseda (SILS – School of International and Liberal Studies). Un trentaine de personnes se sont jointes à l’évènement, dont 6 Français et Monsieur Detey, professeur de Français et d’Introduction à la Francophonie (entre autres) ici-bas. Organisée par le SFN (SILS French-speaking Network), cette soirée avait pour but de présenter des Français aux Japonais de Waseda désireux de les rencontrer.

Les organisateurs ont choisi un lieu fort sympathique : un Izakaya (endroit où l’on peut manger et boire à volonté pour 25€) près de Takadanobaba, spécialisé dans la cuisine d’Okinawa, une île tropicale assez loin au sud de l’archipel. Le décor était vraiment chouette, avec des peintures colorées sur les murs, des tables basses en bois avec des coussins rouges, des lanternes (bleue-blanc-rouge, coïncidence ?)…

DSC01946L’un des nombreux plats délicieux. Il s’agit d’un « raisin de mer », avec des « bubulles qui font une sensation bizarre en bouche ». Cette salade était magique.

Vu le nombre limité que nous étions, on a décidé de nous caser à maximum deux Français par table, pour faire mieux connaissance. J’étais assez impressionnée de voir à quel point les étudiants étaient intéressés par la langue et/ou la culture française. Le niveau de langue de certains m’a également bluffée ! C’est vraiment surprenant de voir un Japonais s’exprimer et parler comme un étudiant Français (et ça fait d’ailleurs culpabiliser sur son propre niveau de japonais – hum). Ce qui est déroutant aussi, c’est l’attention qu’on nous porte parce qu’on est Français. J’étais consciente que la langue française avait un certain pouvoir d’attraction, mais je n’en saisissais pas l’ampleur avant de me rendre à Tokyo. « C’est joli, c’est comme de la musique » m’a dit Amber, une adorable Taïwanaise de mon cours de Francophonie. [Et quand Marie et moi on parle comme des racailles dans la rue, « Meuf, t’as vu ? », « Ouaich ziva, mais c’est sa mère la **** ! », « Mais abusé comment ça fait trop ièch » , c’est joli aussi ? ^^ »]. Bien entendu, il doit y avoir beaucoup de choses derrière la langue elle-même qui attirent les étrangers… mais je n’ai pas encore bien saisi ce que c’était, et j’espère le comprendre cette année, avec l’aide entre autres de mon cours de Francophonie.

Bref, cette soirée fut une expérience très agréable. Rencontres et alcools étranges étaient au programme (mais c’est quoi ce « saké de prunes pour les femmes ? »).  Merci à Risa Taniwaki pour cette photo :

SFN party Risa TaniwakiPour situer les protagonistes déjà évoqués dans ce blog : à ma droite Marie ; et à ma gauche dans l’ordre : Amber, monsieur Detey, Morgane.

 

Puisque le sujet de l’article est la langue française, j’en profite pour dire que je suis fière d’avoir trouvé deux élèves pour des cours particuliers de Français. J’ai déjà donné un cours d’une heure, qui s’est très bien passé. Aaah, enseigner le français à des étrangers est quelque chose qui m’a toujours attirée… même si ça demande pas mal de travail, et un recul sur sa propre langue que je n’ai toujours pas pour l’instant. Mais ça n’en est que plus enrichissant !

Bon, il faut que je pense à améliorer mon japonais aussi. Mais ça y est, maintenant je sais dire « j’aime le riz au curry parce que ma mère est douée en cuisine indienne », donc voilà, la base quoi.

Sinon, j’ai reçu du courrier récemment ! J’en remercie grandement les expéditeurs, parce que ça fait vraiment vraiment plaisir de recevoir autre chose que du courrier de ma banque 🙂 N’hésitez pas à m’écrire si vous avez un peu de temps, je réponds toujours ! Et maintenant que j’ai des stickers de malade, je peux vous faire des lettres canons !

TO BE OR NOT TO BE RADIOACTIVE

La radioactivité du coin est quelque chose qui nous préoccupe plus ou moins au fond de nous en tant qu’étudiants étrangers à Tokyo. Sommes-nous vraiment à l’abri ? Comment savoir si ce que nous mangeons ou respirons va donner à nos futurs enfants des allures de Shrek ? Va-t-on devenir aveugle si on reçoit une goutte de pluie dans l’oeil ? Risque-t-on l’arrêt cardiaque si on mange des champignons ? La transparence de l’eau du robinet cache-t-elle quelque chose ?

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Avant de partir, j’ai expérimenté comme beaucoup d’autres étrangers ici des tentatives de dissuasion massives face à ma volonté de passer un an à Tokyo. Et oui, la radioactivité ça ne se voit pas, donc ça fait peur. Mais il n’y a peut-être pas tant de raisons que ça de s’inquiéter, il suffit juste de ne pas faire des choses inconscientes. Explications :

-La nourriture. Le gouvernement japonais effectue des contrôles sur les aliments. Ceci dit, c’est loin d’être une raison pour se reposer sur nos lauriers, étant donné qu’on ne sait pas vraiment si les seuils déterminés comme fiables sont sans risques pour la santé. Donc, la solution c’est d’éviter d’acheter des produits provenant des régions où la radioactivité mesurée est un peu plus élevée que la normale. J’essaye donc de privilégier les produits venant du Sud ou du Nord du pays, même si c’est pas toujours évident étant donné que les produits qu’on trouve à Tokyo viennent les régions agricoles les plus proches, qui ne sont pas si loin de Fukushima. Ca fait toujours un peu peur de voir écrit sur l’emballage « préfecture d’Ibaraki » (voisine directe de Fukushima)(j’ai acheté du lait hier qui vient de là, ça m’apprendra à vouloir changer de marque). Et puis, il y a toujours cette bouteille d’eau dans mon supermarché fétiche, qui vient du parc naturel Oze de la préfecture de Fukushima (« Oze… faut oser ! » ceci est un joke de Marie, applaudissez-la bien fort s’il vous plaît). Ouais, mais non, on se rabat sur l’eau du Mont Fuji. Sinon, l’une des règles d’or est d’éviter autant qu’on peut les champignons et les produits venant de la mer.

-L’air. Là normalement il n’y a pas de risques. La radioactivité mesurée dans l’air est équivalente à celles des grandes villes françaises. Marie m’a même affirmé qu’en Italie certaines villes sont à l’heure actuelle plus radioactives que Tokyo. Donc, on respire tranquillement (ouf). Le site le l’IRSN (Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire, institut indépendant) avait confirmé à mon départ que résider à Tokyo ne présentait pas de risques.

-La pluie. Arf, ça c’est l’inconnue totale. D’où viennent les nuages ? Sont-ils chargés de particules qui sont montées haut dans l’atmosphère ? Solution : le parapluie, même par temps de mini crachin. C’est pas pratique dans les rues bondées de monde, mais c’est rassurant. Et puis, c’est toujours classe d’avoir un parapluie transparent (d’un point de vue français uniquement, parce qu’ici les parapluies transparents ce sont des parapluies cheap).

-L’eau du robinet. Inconnue numéro deux. Le gouvernement a affirmé qu’elle ne présentait plus aucune trace suspecte. N’empêche, il y a des fois où je ne peux m’empêcher de mélanger l’eau du robinet à de l’eau minérale pour faire mon thé, on ne sait jamais.

-… et les Japonais dans tout ça ? Dans mes souvenirs, aucun Japonais ne m’en a parlé. De toute façon, ils n’ont pas le choix, ils vivent ici. J’ai vu dans un article que certaines mères de famille faisaient vraiment attention pour leurs enfants (tout à l’eau minérale, produits venant uniquement du sud). Ceci dit, j’ai également entendu que certains produits venant directement de Fukushima étaient consommés sans problème, pour « aider la région à se remettre » de la catastrophe. Urg. Autre fait choquant : Morgane, une autre Française d’ici qui a eu des mauvaises expériences en famille d’accueil (mais ça c’est une très longue histoire) a entendu de la bouche de ses hôtes « ah mais faut pas t’inquiéter pour Fukushima… c’est fini tout ça, fini ! ». Oui, mais en attendant il y a toujours un des réacteurs qui s’enfonce dans le sol chaque jour un peu plus…

 

Donc voilà, vivre à Tokyo c’est possible. Et je rappelle que je ne reste qu’un an !

Vous n’avez pas eu le droit à un article de touriste aujourd’hui… tout simplement parce que je n’ai rien fait (à part nettoyer ma chambre, faire une lessive et bosser, tout un programme passionnant). La semaine prochaine, je compte visiter un temple polémique qui est dédié à la mémoire des soldats de la Seconde Guerre Mondiale, y compris à des criminels de guerre.

Comme je viens de vous faire un article pas très fun, je vais terminer sur une vidéo drôle que j’ai découverte grâce à Marie :

 

 

 

Il s’agit d’un clip du groupe Arashi, THE boys-band local, qui est sur toutes les affiches de pub. Ces jeunes hommes (enfin « jeunes », mouais, ils ont bientôt tous 30 ans) sont totalement dulés. Cependant, ils commettent des fautes de goûts, comme vous pouvez le constater. Marie a d’ailleurs très bien repéré ces franges absurdes autour d’un pantalon, et cette ceinture de danse orientale inappropriée (« mais pourquoi ?? POURQUOI ?? »). Merci Marie, je regarde cette vidéo en boucle depuis hier, ça me met de bonne humeur 😀

QUAND LA NUIT TOMBE SUR SHINJUKU

Encore un dimanche propice aux excursions. Après manger, Marie et moi allons effectuer notre pèlerinage régulier à Harajuku (quartier jeune branché et décalé pour ceux qui ne suivent -vraiment- pas). Comme la toute première fois que j’y suis allée, le dimanche est un jour de pointe ici-bas. Un peu de shopping s’impose quand même (oui parce que j’ai enfin un compte en banque ET de l’argent) : j’achète le minimum vital à savoir collants de couleur et une montre jaune (mais où est passé le manteau d’hiver bleu électrique que j’avais repéré ??). Marie finit par m’entraîner dans cette obscure boutique où rode le mal… le mal étant incarné par ces nombreux objets à l’effigie des stars-idoles de la J-Pop (chanson populaire japonaise, boys-bands et compagnie). Effrayant…

Aaah, Harajuku… je ne m’en lasserai jamais. Je n’ose pas prendre les gens excentriques en photo, et c’est bien dommage, parce que ça serait beaucoup plus parlant qu’une simple description ! Il y avait cette fille aux cils rouges, aux étoiles en plastique dans les cheveux, avec son tutu jaune fluo et ses collants bleus, et ses mèches vertes… incroyable.

 

Bon, nous sommes quand même des étudiantes de l’une des plus grandes universités de la capitale, ce qui implique une certaine dose de travail personnel. Marie rentre donc directement à la résidence pour s’assigner à cette tache ingrate. Pour ma part, j’ai déjà bossé un peu samedi, je me permets donc d’aller réaliser mon fantasme de la journée. Oui, quand je me suis réveillée ce matin, j’ai pensé « et si j’allais faire un tour en haut du Metropolitan Building de Shinjuku, là où on a une belle vue de la ville totalement gratuitement ? ».

DSC01907Je laisse donc la pauvre Marie toute seule compressée dans ce train en pleine heure d’affluence, et je descends à Shinjuku. Le quartier de Shinjuku (qui est en fait un arrondissement-ville, qui englobe mon quartier de Waseda / Takadanobaba) est à la fois un quartier d’affaires, et également un quartier de shopping et de détente, sans compter les clubs pour adultes un peu bizarres. Ce quartier est pour nous autres étudiants étrangers également synonyme de formalités : c’est là que l’on a du souscrire l’assurance maladie, et obtenir l’équivalent d’une carte de séjour (moyennant des heures d’attente et de découverte de la bureaucratie japonaise). C’est également à Shinjuku que j’ai du lutter pour ouvrir un compte en banque.

Mais aujourd’hui, j’y vais l’esprit tranquille, en mode touriste ! Armée de mon guide Lonely Planet, je cherche le chemin menant jusqu’au Metropolitan Building. Je n’ai jamais eu vraiment le sens de l’orientation, donc j’ai fais quelques détours inutiles… et entre-temps, la nuit tombe doucement, mais sûrement.DSC01911

La partie commerce cède place à la partie buildings… je ne sais pas comment je vais reconnaître le mien. Je trouve des plans dans la rue, essaie de les suivre. La nuit continue d’arriver, et les rues immenses sont de plus en plus désertes. Je finis par comprendre où je suis grâce à un panneau bilingue qui m’indique où se trouve l’observatoire.

Me voilà au rez-de-chaussé du Metropolitan Building, faisant la queue avec une dizaine de touristes pour monter dans l’ascenseur. Beaucoup d’étages plus tard, une vue merveilleuse s’offre à moi… je ne m’attendais pas à ça. Finalement, je suis arrivée à une heure parfaite ! Le soleil venait à peine de se coucher, les couleurs du ciel était magiques… et là sur la ligne d’horizon se découpe l’ombre du Mont Fuji, si imposant et majestueux… et en bas, Tokyo toute illuminée qui s’étend à perte de vue. Le mélange entre les lumières de la ville et la sobriété du Mont Fuji rendait la scène presque surréelle. Mais au fond, c’est ça Tokyo : une métropole bouillante qui reste attachée à « l’esprit japonais ». Qu’est-ce que j’aurais aimé avoir un vrai appareil photo pour avoir des images fidèles de ce que j’ai pu observer tout à l’heure…

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(j’en ai mis d’autres dans l’album Shinjuku by night)

Je rentre tranquillement en métro, des étoiles plein les yeux. Sur le chemin du retour, je croise du Nutella dans un magasin, ce qui rajoute une dose d’euphorie à mon état. Et voilà comment j’arrive à faire de mes dimanches des journées très productives. A la semaine prochaine !

UN WEEK-END PARTICULIER

Pourquoi particulier ? Parce que ça fait un mois que je suis à Tokyo… j’ai très peur que les prochains mois passent aussi vite que le premier, malgré tout ce que je fais pour en profiter à fond.

Mais ce week-end, j’ai également fait deux sorties vraiment mémorables.

 

SAMEDI 8 OCTOBRE

 

Le musée national de Tokyo organisait une journée gratuite pour tous les étudiants étrangers !  J’y suis donc allée sans hésiter, accompagnée de deux Françaises, Marie F. (et non ce n’est pas la Marie de d’habitude) et Morgane, toutes deux étudiantes à Waseda.

Pour y aller, nous traversons le parc Ueno, celui que j’avais regretté ne pas avoir eu le temps de visiter lors d’une précédente excursion. Cet endroit est très agréable, avec son grand chemin, ses temples, ses arbres tombants de chaque côté. Tout au bout, il y a le musée national. Nous avons le temps de faire un tour avant de nous inscrire à la cérémonie du thé. Devant nous s’offre une immense collection d’art ancien : statues de bois, objets d’écriture travaillés avec soin, céramiques… l’art traditionnel japonais est vraiment magnifique, c’est d’une finesse incroyable. Beaucoup de statues m’ont fait penser aux représentations des dieux hindouistes.

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Lorsque nous souhaitons nous inscrire, c’est la déception : le nombre de personnes maximal a déjà été atteint ! Tristesse, nous étions vraiment venues avec l’intention d’assister à cet évènement vraiment incontournable au Japon. Mais la dame en kimono nous a dit qu’ils en organiseront d’autres, payantes mais pas si chères.

Nous sortons pour trouver quelques chose à manger à Marie F. et Morgane (moi j’avais mon bento, j’aime faire ma Japonaise et préparer mon petit repas à l’avance). Le meilleur endroit est le marché d’Ameyoko. Vous vous souvenez ? Il s’agit du marché à ciel ouvert ultra bruyant, immense, et tellement riche en surprises. Voilà en vidéo un petit aperçu de ce que peut être l’ambiance de ce marché :

 

 

Les filles ont acheté des gyosas, sortes de beignets délicieux en forme de croissant. Ils étaient aux légumes ! Morgane m’en a fait goûter un, c’était magique.

Nous sommes allées manger au bord du lac d’Ueno. C’est l’endroit rêvé pour les amoureux qui veulent faire du pédalo dans un cygne très kitsch, ou qui veulent faire de la barque tout simplement. C’est aussi le paradis des carpes et des canards. Allez faire un tour dans l’album photo « Ueno et musée national », vous vous rendrez peut-être compte de l’effet bizarre que ça peut faire de voir un lac dédié à la tranquillité en plein milieux d’immeubles.

DIMANCHE 9 OCTOBRE

Aujourd’hui l’association qui s’occupe des étrangers avait lancé l’un de ses événements phares : le pique-nique ! Oui, au Japon octobre c’est le mois des pique-niques. Il fait très beau, et encore très doux. Direction Yoyogi, un parc près de Harajuku (le quartier jeune, pour ceux qui n’auraient pas suivi). Dès qu’on entre, on est dans l’ambiance : deux groupes de Japonais déguisés en rockers dansent en cercle. C’était très drôle à voir. Encore une toute petite vidéo pour votre bonheur :

 

 

Nous étions plus d’une cinquantaine à squatter une partie de la pelouse. Marie et moi nous avons rejoint un groupe dans lequel quelques têtes ne nous étaient pas inconnues : un Allemand, deux Italiennes de notre dortoir, et pour ma part la Japonaise qui m’avait accueillie à la gare le premier jour. Très bonne ambiance, avec conversations en Japonais et en Anglais, sans oublier les photos typiques.

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On quitte le parc lorsque la nuit commence à tomber. Avec un petit groupe nous décidons de nous balader à Takeshita-dori, la rue principale d’Harajuku (ma préférée bien évidemment). C’était un peu dur psychologiquement, vu que je ne dois rien dépenser vu-que-j’ai-toujours-pas-de-compte-bancaire-réellement-fonctionnel, donc je me suis contentée de faire du repérage. Il y a vraiment moyen de faire des affaires, en fait. J’ai mis sur ma liste un poncho violet (ouais ouais).

Et voilà, cette journée fort sympathique s’est terminée dans mon quartier préféré, que demander de plus ? Et même l’absence de Toblerone à 0,50€ dans mon supermarché n’a pas altéré mon bonheur. Ca y est, ça fait un mois que je suis au Japon, et j’aime Tokyo encore plus chaque jour !

DSC01892Takadanobaba, mon quartier, vu de la sortie de la gare

LES SURPRISES NIPPONES

Une Japonaise prénommée Azu, rencontrée à une soirée, m’a croisée sur le campus il y a deux jours. « Il est temps qu’on mange ensemble un jour! » m’a-t-elle dit. Et voilà comment ce midi nous nous sommes retrouvées toutes les deux sur un banc du campus, essayant de manger en affrontant le vent ambiant, et bavardant en anglais.

DSC01838Une partie du parc de la fac, « Okuma Garden » (mais c’est pas là qu’on a mangé en fait, donc oui ça sert à rien)

« Qu’est-ce qui t’as le plus surpris lorsque tu es arrivée au Japon ? » En voilà une question. Je me l’étais jamais vraiment posée. Et pourtant… Je n’ai pas pu fournir de réponse précise à Azu sur le moment . Ça m’a travaillée tout le reste de l’après-midi. Finalement, je me suis rendue compte que chercher une seule réponse qui soit précise, pertinente et sincère était vain. Ce pays est tellement une surprise en lui-même qu’il faudrait répondre « le Japon », ou alors « les Japonais ». Ceci dit, ça ne m’a pas empêchée de penser dans le désordre à tout ce qui m’a vraiment marquée ces dernières semaines.

 

-La pub : les publicités sont absolument partout, avec au choix des femmes-fillettes bière à la main, un boys band vendant des téléphones (Marie, dédicace), une top model soulignant la beauté des toilettes du métro… Sans compter les vendeurs dans la rue qui tendent des prospectus en scandant sans cesse le même slogan, les petits supermarchés tous les 10 mètres, les échoppes de nourriture omniprésentes…Tokyo est la personnification de la consommation, c’est dingue.

-La confiance : ici, la confiance règne. La preuve : les vélos sont laissés sans cadenas au bord du trottoir. Vous imaginez cette scène dans Paris, ou même à Rennes ? Tokyo, c’est une capitale, pourtant. Des portières de voitures sont quelques fois laissées ouvertes (parfois ce sont les portes des maisons). Pour réserver leur place à la cafèt, les étudiants laissent des téléphones sur les tables. Se balader avec un sac ouvert dans le métro/train à l’heure de pointe ne pose aucun souci. Personne ne fraude le métro. Et à la sortie des magasins, il n’y a pas ce genre de portique vertical qui est censé bipper en cas de vol. La première fois que je suis allée imprimer des documents, il y avait juste une petite tirelire avec écrit « svp mettez de l’argent ici quand vous imprimez ». Cette confiance libère un peu l’esprit, on se pose moins de questions que dans une grande ville européenne.

-Les vêtements des Japonais : on pourrait écrire un livre dessus. Je m’attendais à voir des choses improbables, mais confrontée à la réalité, je peux véritablement dire que j’ai été surprise plus d’une fois. Chemise à carreaux avec foulard à carreaux mais pas-de-la-même-couleur, avec chaussures à carreaux mais-encore-couleur-différente. Baggy à pois, colliers-chaînes de rebelles, bottes roses à strass… bon, j’exagère, il y a quand même un grand nombre de gens « normaux ». Mais quand même, quand il y a des excentriques, leur niveau d’excentricité est supérieur à tout ce qu’on peut concevoir.

-La courtoise : souvent orchestrée, d’ailleurs. Que ce soit les « bienvenue ! » des vendeurs pimpants et tout sourire, les ouvriers dans la rue qui vous adressent des politesses et courbettes lorsque vous faites le petit détour obligatoire pour éviter les travaux, les formules toutes faites des caissières qui vous rendent la monnaie… c’est très ambigu. D’un côté c’est très appréciable toute cette politesse, mais de l’autre on sent qu’elle n’est pas si sincère que ça, surtout si elle est répétée de manière méthodique.

-Les bâtiments : certains sont si fins ! Et en plus d’être fins, ils sont haut. Pour que vous visualisiez : un immeuble peut faire 5 étages, mais avec la profondeur de ma chambre. Un Mikado, quoi. Mais tous ne sont pas comme ça. Et même si ils sont souvent très hauts, l’ensemble n’est pas si étouffant. C’est loin d’être harmonieux, mais on sent quand même une sorte de continuité, de fluidité…

DSC01831Vue d’un bout de mon quartier du toit de ma résidence universitaire

-La nourriture dans les supermarchés : quand on ne connaît rien, on est vraiment perdu. Je me revois fouiner de fond en comble les magasins lors de mes premiers jours, à la recherche d’un aliment qui ne me réserve pas de surprise après ouverture de l’emballage… boulettes de riz, tranches de tofu, algues et petits alevins séchés, jus de fruits chimiques, légumes en forme d’épinards, sauces au soja, oeufs semi-bouillis… et encore beaucoup d’autres choses que je ne comprendrais jamais, tant le nombre de tubes/sachets/bouteilles est délirant.

 

Voilà un petit aperçu de ce qui m’a vraiment étonnée depuis presque un mois. Si je l’avais voulu, j’aurais pu enfoncer tous les stéréotypes (oui, les gens sont très petits ici, oui ils ont les yeux vraiment bridés, oui il y a des tremblements de terre, oui ils ont parfois un anglais bizarre, oui ils ont des toilettes nouvelle génération, NON ils n’ont pas la peau jaune). Mais bon, ces stéréotypes sont basés sur du vrai, pas besoin donc de m’attarder là-dessus.

 

Sinon, j’ai enfin un téléphone portable ! Ce fut le parcours du combattant, mais je suis finalement intégrée à la société japonaise, avec un portable blanc à clapet beaucoup plus intelligent que Kévin. Par contre, je n’ai toujours pas vraiment de compte en banque, donc si jamais vous avez de l’argent en trop, surtout envoyez-moi des billets, pour que je puisse aller au karaoké.

Demain je me fais une grande sortie au Musée National, qui organise une journée gratuite pour tous les étudiants étrangers, avec des activités culturelles qui ont l’air géniales, comme assister à une cérémonie du thé ! Un beau moyen de fêter mon premier mois au Japon… et de re-remplir mon blog de photos.