Le cœur de la région cantonaise

Zhuhai est située dans le Guangdong, une grande et riche région du Sud de la Chine, dans laquelle on parle davantage cantonais que mandarin. La capitale de la région est Guangzhou, ou Canton pour les francophones. Thomas et moi y sommes allés début novembre à l’occasion d’un examen de français : j’étais jury pour le DALF C1. Je vous passe les détails, l’épreuve a eu lieu pour moi toute la journée du dimanche. Je vais plutôt vous parler de notre journée découverte du samedi.

L’université où je travaille, Sun Yat-Sen, est basée à Canton : Zhuhai en est un campus annexe. Il est possible de prendre l’une des navettes inter-campus, ce que nous avons fait pour faciliter notre déplacement jusqu’à la mégalopole de Canton. Au bout de deux heures de route, lors desquelles nous avons vu défiler une campagne industrielle peu intéressante, nous avons mis pied à terre sur un trottoir à l’activité bouillonnante, et nous nous sommes engouffrés dans une bouche de métro. Des métros, nous en avons connus des compliqués, et j’ai eu l’occasion d’en dompter quelques-un en Asie (Tokyo, Kuala Lumpur, Singapour). C’est avec confiance que nous nous sommes donc dirigés vers une borne pour acheter notre ticket, dont le prix dépend de la destination finale, à sélectionner sur cette même borne. Enfin, ce n’était pas un ticket, mais un jeton en plastique. Magnétisé, n’est-ce pas : il fallait le faire glisser au même endroit que les cartes de transport des habitués. Ça, nous avons mis un peu de temps à le comprendre.

C’était donc notre premier contact avec Canton : un flot incessant mais relativement ordonné de personnes en mouvement, une fluidité appréciable qui m’a rappelé le Japon. Je me sens bien dans les environnements urbains qui ressemblent à ça. Mais ne perdons pas de vue notre objectif : un bon restaurant (oui, vous savez qu’on aime bien ça). Nous nous sommes égarés dans une zone étrange, un énorme centre commercial dédié uniquement aux grossistes de vêtements et de tissus, avant de passer par une zone résidentielle populaire, par une avenue au-dessus de laquelle s’élevait une autoroute urbaine, avant d’atterrir enfin dans un excellent restaurant végétarien, un peu haut de gamme il faut l’avouer.

Rouleaux croquants à la patate douce locale, avec au fond des champignons frits
Salade de fruits finement découpés dans leur sachet en feuille de riz

Nous voilà donc revigorés et prêts pour une grande promenade : direction l’île de Shamian qui, d’après notre guide, représente le passé tranquille de Canton. L’endroit est sympathique, plus calme que le reste de la ville, mais j’étais surtout fascinée par les différentes vues sur la Rivière des Perles et sur la ville. Comme dans tout endroit à l’architecture un peu coloniale, les Chinois se prennent en photo devant des vieux bâtiments ou des lampadaires classiques. Des lycéennes nous ont interrogés en anglais sur nos habitudes d’achat de montres (c’était leur devoir du week-end), j’ai obtenu une sucette pour avoir répondu à leurs questions. Mais l’heure tournait rapidement : il était temps de rejoindre l’Alliance Française de Canton, où devait se tenir une réunion pour préparer l’examen du lendemain. Le soir, le directeur de l’Alliance nous a emmené mangé un bon couscous.

Pendant cette journée nous n’avons rien visité d’emblématique, mais nous avons pu prendre le pouls de Canton. J’ai compris que c’était dans une ville de ce genre que j’aurais souhaité vivre… Zhuhai est trop étalée, trop calme, trop récente. Je préfère l’agitation du centre-ville de Canton, où tout est concentré. En m’y promenant, j’ai également compris que ce qui me stimule en Asie, c’est ce qui m’avait plu au Japon : le mouvement, la facilité de déplacement, le désordre dans l’ordre. Canton n’est pas une belle ville en soi, au même titre que Tokyo, mais ses grandes avenues et ruelles entremêlées dégagent quelque chose, une véritable âme vivante qui fait défaut à Zhuhai. On sait qu’en s’y promenant, on tombera sur des surprises, on découvrira des coins charmants méconnus, on observera des tranches de vie authentiques. J’ai malheureusement pris conscience de la superficialité de Zhuhai qui, construite en à peine 30 ans, n’a pas eu le temps de vivre des choses qui laissent des traces perceptibles dans son atmosphère. À Canton, j’ai enfin vu ce que j’attendais de la Chine, et Thomas et moi comptons bien y retourner très rapidement. Mais avant cela, direction Macao… dans le prochain article !

Anecdote bonus : les urgences en Chine !
Le dimanche soir, Thomas nous emmène dans un petit restaurant indien (optimisation culinaire maximale). C’était très bon, mais en repartant j’ai un geste stupide : je loupe une marche dans un escalier… Me voilà avec une cheville foulée. Impossible de marcher, la douleur augmente au même rythme que l’articulation enfle. Direction donc les urgences : Thomas me soutient pendant que je saute à cloche-pied, et se dirige vers l’accueil pour expliquer la situation. Il faut d’abord m’enregistrer auprès d’une infirmière pas sympa. Celle-ci dit à Thomas que je dois me déplacer jusqu’à l’accueil. Thomas explique que ce n’est pas trop possible. Elle lui dit de se débrouiller pour trouver un fauteuil roulant.

Le fauteuil obtenu, et l’enregistrement effectué, on m’envoie à la salle de consultation n°6. Sur le chemin, je vois des gens avec la tête en sang, des enfants qui crient… je relativise. Le médecin nous reçoit avec un air de jugement dans ses yeux. Il nous demande l’air désabusé depuis combien de jours mon pied est comme ça (« mais… ce sont les URGENCES, je viens de me faire mal quoi, je veux pas rentrer à Zhuhai comme ça ! » – je le pensais mais je ne l’ai pas dit). J’ai eu l’impression de passer pour une petite chochotte. Ok, mon pronostic vital n’est pas en danger, mais j’ai mal. Il examine mon pied, et nous envoie faire une radio. Ce n’était pas une mince affaire : on a galéré à trouver l’endroit (merci aux infirmières pour leurs molles indications), et une fois sur place il fallait insister pour que la responsable sorte de sa salle de pause. Trente minutes plus tard, voilà la radio imprimée. On retourne voir le médecin de la salle n°6. Il regarde la radio, et dit « ça va, ce n’est pas cassé. Au revoir ». Je lui demande quand même ce que je dois faire. « Appliquez de la glace, et buvez de l’eau chaude ». Ok, merci. Et le baume du tigre alors ? Bref.

Nous avons pris une nuit d’hôtel supplémentaire à Canton pour que je puisse me reposer. Bon, j’avoue, ce n’était pas grave : le lendemain je pouvais marcher, lentement mais sûrement. J’ai même réussi à faire cours l’après-midi (ai-je mentionné qu’à l’université les professeurs n’ont pas le droit de s’asseoir en classe ?), et à refaire du vélo le surlendemain. La cheville a mis du temps à désenfler, mais la douleur a disparu assez vite. Le docteur avait raison, ce n’était pas grave du tout. Mais sur le moment, un petit peu plus d’attention de sa part ne m’aurait pas fait de mal. Heureusement que Thomas était là !

2 commentaires sur “Le cœur de la région cantonaise

  1. Voilà, les URGENCES en Chine s’est fait ! Vous savez maintenant qu’il vaut mieux les éviter ! Quand au baume du tigre, j’espère que tu en as pris avec toi… Bon, j’espère quand même que tout est rentré dans l’ordre pour ta cheville. Jolies photos, comme d’habitude ! MIAM (pour les plats). Bises

  2. Merci pour ce bel article, vivant, coloré, appétissant, intéressant, avec la touche d’humour (métro).
    Je comprends que votre virée à Canton vous ait plu: je vous reconnais et vous imagine bien. Peut-être que ce « flux » et autres stimulations sont « éprouvants » sur la durée? Je suis soulagée que ta blessure à la cheville soit bénigne. Reste prudente car le corps a une mémoire; soigne-toi (repos et précautions) le temps nécessaire pour pouvoir retourner à la découverte de la Chine en pleine forme!

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