Parenthèse cubaine : La Havane

Le monde latino-américain est grand. Nous avons décider de pousser le voyage un peu plus loin qu’à l’accoutumée, de dépasser la communauté andine pour visiter l’île la plus célèbre des caraïbes : Cuba.

Comment résumer deux semaines magiques, sans tomber dans les clichés habituels de l’émerveillement enfantin devant la beauté et la différence ? Ce ne sera pas possible, je n’ai pas envie de prendre trop de recul pour écrire cet article. Vous allez donc avoir le droit à une bonne dose de beaux clichés, que je m’efforcerai de détailler avec le plus de justesse possible 🙂

Commençons par notre première étape : La Havane, célèbre capitale de l’île. Malgré un atterrissage au coucher du soleil, il faisait nuit quand nous sommes sortis de l’aéroport, à bord d’un taxi au chauffeur très gentil, et très bavard. Ce fut notre premier contact avec l’espagnol cubain, il nous a fallu du temps pour nous y habituer. Ce chauffeur nous a conduit à notre première casa particular, au cœur de la vielle Havane populaire. Premier obstacle : la porte de l’immeuble était fermée. Vous le savez sûrement, il n’y a quasiment pas Internet à Cuba, donc impossible de contacter notre hôte (qui répond au doux nom de Lolita) via le site Air Bnb, il fallait l’appeler sur son numéro de portable. Deuxième problème : nos cartes sim équatoriennes ne permettent pas d’appeler depuis l’étranger. Nous avons donc demandé à une passante de passer l’appel via une cabine publique, avec l’aide d’un sdf qui m’a échangé des pièces de monnaie. Le problème n’a pas été résolu car Lolita ne répondait pas, mais une habitante de l’immeuble a pris le relais : elle nous a ouvert la porte, nous a offert un café dans son petit appartement en compagnie de sa mère, et a réussi à contacter Lolita. Cette dame fort sympathique s’appelle Jacqueline, on la reverra plus tard.

Je dois préciser à ce stade de mon récit ce que sont les casas particulares : à Cuba, les hôtels (qui appartiennent tous à l’État) sont souvent très chers et réservés aux voyageurs avec plus de moyens que nous. L’autre option d’hébergement, très répandue, est la chambre chez l’habitant, très économique, et surtout plus authentique. C’est celle que nous avons choisi pour tout le voyage. Chaque maison ou appartement qui propose une ou plusieurs chambres à louer aux touristes a sur sa porte un sigle « Arrendador Divisa », qui indique que les propriétaires sont bien en règle et reversent à l’État les taxes dues sur les gains de ces hébergements touristiques. Nous avions réservé chaque chambre via Air Bnb, mais une fois arrivés à Cuba nous nous sommes rendus compte qu’un nombre impressionnant d’habitants avaient sur leur porte ce symbole, et qu’il nous aurait suffi de frapper à quelques portes pour trouver un lieu où dormir.

Malgré les petits inconvénients de l’arrivée, nous avons pu nous rendre compte immédiatement de la gentillesse des Cubains. Nous avons été touchés par l’aide que ces quelques personnes nous ont apporté, désintéressées, alors que nous étions une cible facile : des touristes nouvellement arrivés, dans un quartier pauvre de la ville. Nous apprendrons plus tard que toute La Havane est une ville très sûre, pour les habitants comme pour les touristes.

Notre espagnol nous a sauvé, et nous a permis de nouer plus facilement contact avec les cubains. Je nous félicite d’avoir fait ce voyage après plus de deux ans en Équateur, pendant que notre espagnol est à son « summum ». Il ne sera sûrement plus aussi bon dans quelques années faute d’immersion linguistique. J’ai été ravie de pouvoir le mettre à l’épreuve à Cuba, où les mots sont davantage mâchés et le débit de parole plus rapide. Échanger avec les gens dans leur propre langue est plus authentique, et sur cette belle île les gens aiment parler. J’en ai profité, ce sera autrement plus compliqué quand on voyagera en Chine…

Bref ! Laissons de côté mes considérations linguistiques, et passons à la suite de la première nuit : après avoir erré tout ce temps, il se faisait tard, et nos ventres criaient famine. Nous sommes sortis dans la rue à la recherche d’un restaurant où d’un boui-boui où se sustenter. Un couple de cubains nous a abordé pendant qu’on marchait, et nous ont posé quelques questions pour faire connaissance. Ils cherchaient eux aussi un endroit où manger, mais tous les restaurants commençaient à fermer. Hop, pas d’hésitation : ils nous ont proposé de manger chez eux.

Franck et (j’ai oublié son nom ! zut) sont médecins à La Havane. Être docteur à Cuba ne signifie pas la même chose qu’être docteur en Europe : ils vivent avec un salaire de misère dans un appartement décrépi mais chaleureux, avec leurs deux enfants. Ils nous ont préparé un repas simple, mais formidable par le symbole. Le charme a été rompu quand, avant de partir, ils ont demandé un dédommagement, et, non satisfaits devant le billet que nous leur tendions, ont demandé à doubler la somme. Dommage, car leur conversation était honnête, leur gentillesse ne semblait pas fausse.

Après une bonne nuit de sommeil, nous sortons dans la rue, première découverte de La Havane en plein jour. Le bruit de l’agitation, des personnes qui s’interpellent, des chiens qui aboient, des chauffeurs de taxi qui proposent leurs services… les couleurs des façades des hauts immeubles coloniaux, les graffitis vantant le Che Guevara ou Fidel Castro, la lumière du soleil crue qui alterne avec l’ombre sur les trottoirs impraticables, le chrome des vieilles voitures américaines… Et la chaleur ! C’était un premier contact déroutant, mais magique et inoubliable. Tout était à prendre en photo (vous trouverez tout l’album à la fin de la page, attention il est costaud).

 

Malheureusement, nous avions quelque chose d’important à finaliser avant de nous adonner pleinement à la visite de la ville : régler nos problèmes de transports pour la suite du voyage. Oui, c’est un peu compliqué à Cuba à ce niveau-là, mais après quelques heures de déplacements de bureaux d’agences de voyages en compagnies de bus, nous avons réussi à fixer nos trajets futurs. Il ne nous restait plus qu’à annuler un hébergement sur Air Bnb et à réserver une nuit de plus dans une autre ville. Hélas, ce fut le plus difficile, car pour le faire nous avions besoin d’un élément en apparence banal mais qui fait défaut à Cuba : une connexion Internet. Nous avons donc cherché un « point wifi » public tant bien que mal. Après environ deux heures de marche, de la Plaza de la Revolución jusqu’aux quartiers résidentiels du Vedado, nous avons trouvé un parc adéquat. Mais une fois sur place, il nous manquait le sésame précieux : une carte de connexion ! Et oui, c’est comme une carte téléphonique (profitez-en pour essayer de vous rappeler de la dernière fois que vous avez utilisé une cabine téléphonique en France), mais pour Internet. Nous l’avons trouvée pas loin en suivant une file de cubains qui attendaient devant l’entreprise nationale de téléphonie (il n’y a bien sûr qu’un seul opérateur à Cuba), pour 1 CUC (environ 1€) nous avions le droit à une heure de connexion. Hourra !

Une fois nos problèmes réglés, et résolus à ne plus jamais chercher à utiliser Internet pour le reste du voyage (ce qui m’a fait grand bien !), nous avons suivi la rue des jeunes, la Rampa, avec ses petits bars, ses restaurants, et ses immenses hôtels d’État, qui mène tout droit de l’Université de La Havane à la mer. Nous avons parcouru le malecón, la promenade qui suit le bord de mer, en profitant du vent rafraîchissant de fin de journée. Un mojito, une petite assiette, et hop ! Nous voilà couchés, cette journée a eu raison de nous.

Nous vous inquiétez pas, je vais faire plus simple pour les jours suivants ! Le lendemain de notre aventure piétonne, nous avons choisi le confort : le bus à étage pour touristes (je vous avais prévenus au sujet des clichés). Pendant plus d’une heure nous avons parcouru des lieux plutôt étranges de la ville, entre hôtels monumentaux, hôpitaux, et quartiers résidentiels.

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De retour en ville, nous avons visité le musée que je voulais à tout prix voir : el Museo de la Revolución ! (je précise à ce stade que pendant tout le voyage à Cuba j’étais plongée dans le lecture de la superbe biographie de Che Guevara, écrite par Pierre Kalfon, et que donc j’étais bien dans l’ambiance révolutionnaire) Finalement, la visite a été un peu décevante : même si le bâtiment était magnifique, les explications étaient loin d’être pédagogiques, et surtout très peu (mais ça on s’y attendait) objectives. De l’autre côté du musée, il y a le mémorial Granma, avec de nombreux véhicules militaires et le fameux yacht duquel Fidel Castro, le Che et de nombreux autres révolutionnaires ont débarqué à Cuba en décembre 1956.

Je ne vais pas détailler chaque visite, vous allez vite en avoir marre. Mais je tiens tout de même à raconter un moment de cette seconde journée : en début de soirée, je suis retournée chez Jacqueline (vous vous souvenez, celle qui nous a offert un café la première nuit) pour lui donner un bracelet de ma création en gage de reconnaissance pour son aide précieuse. Elle a énormément apprécié, et nous avons un peu discuté autour d’un nouveau café. Cette dame était vraiment charmante, pleine de vie, authentique. Elle m’a proposé des pommes de terre pour que Thomas et moi puissions nous faire à manger (il faut faire la queue pendant des heures pour en obtenir à La Havane). En échange de sa générosité, je lui ai promis un savon, ce qui lui a fait très plaisir compte tenu du rationnement permanent de ce genre de produits. Thomas et moi nous étions renseignés à ce sujet avant de partir, et avions donc acheté dentifrices, savons, crayons à papier et cahiers pour les donner sur place.

Passons maintenant au troisième jour, le 13 mars. Sur une très bonne idée de Thomas, nous nous sommes levés tôt pour parcourir les rues de la vielle Havane au lever du soleil. Nous avons découvert, encore, des endroits magnifiques. Ma fascination pour les immenses façades de bâtiments aux peintures vieillies ne faisait que grandir à chaque pas, les couleurs étant plus appréciables à cette heure qu’en milieu de journée, ou la lumière est trop crue.

Au cours de la journée, nous avons acheté (et fumé) des cigares au siège de l’entreprise (d’État) qui les fabrique. Je n’ai pas vraiment réussi, contrairement à Thomas qui a bien savouré son Romeo y Julieta conseillé par le vendeur. Je me rattraperai plus tard niveau cigares, attendez l’article sur la Vallée de Viñales.

Nous voilà déjà au quatrième jour, le dernier. Nous avons de nouveau parcouru le malecón, puis (après quelques mojitos en début de soirée dans un restaurant végétarien – oui c’est possible) nous avons pris place à bord d’un petit bateau qui fait la navette avec la ville de Casablanca (oui, une autre), de l’autre côté du Golfe de La Havane. Notre objectif était la forteresse depuis laquelle chaque soir, depuis le 17ème siècle, est tiré un coup de canon à 21h. Nous avons donc assisté à cette tradition en direct, juste derrière le canon, mais assez loin quand même.

Je tiens à préciser que dans le restaurant végétarien mentionné ci-dessus, un cubain m’a prise pour une cubaine. Après avoir compris sa méprise, il s’est emporté dans un monologue passionnant sur le métissage cubain (Pat, où es-tu ?), auquel je n’ai malheureusement pas tout compris (n’oubliez pas qu’il y avait des mojitos dans l’histoire).

Le coup de canon a sonné comme un symbole : au revoir la Havane, nous quittons tes ruelles hautes et étroites et ton agitation frénétique pour aller explorer un coin de nature : la Vallée de Viñales !

Les photos de La Havane :

 

Album spécial vieilles voitures :

4 commentaires sur Parenthèse cubaine : La Havane

  1. Et bien ! Quel récit passionnant pour ce début de séjour, j’attends la suite avec impatience ! 😉 En tout cas waouh ! concernant vous 2 en train de fumer le cigare 🙂 J’essaie de vous imaginer et cela me fait sourire… Les photos sont magnifiques, (comme d’hab !), ah ! les vieilles voitures ! C’est bien une photo de chacun de vous et une (ou plusieurs) du couple… Il y en a ?… Bises à vous 2.

  2. Merci pour cet article vivant: tu écris bien; c’est très agréable; on vous suit dans vos aventures, on compatit pour vos attentes, on sourit de vos rencontres humaines, on s’émerveille au fil des photos, on découvre des « surprises » (j’adore!), on a chaud aussi sous le soleil. Cela me rapproche de vous et c’est bon de partager vos expériences grâce à ton récit. Quelque part à la Havane, une femme porte un de tes bijoux…. Je suis admirative aussi de la manière dont vous avez réglé les problèmes au début de votre séjour. Vous gérez. Quelqu’un qui n’aurait pas l’habitude de voyager, qui ne parlerait pas l’espagnol, serait « perdu ». Je te rassure: pour les clichés, je pense que tu as de la marge! Ne crains pas de nous ennuyer: je rejoins Suzane, j’attends la suite! Et la musique? La danse? Les espaces naturels?
    PS: le livre de Pierre Kalfon, dans quelle langue l’as-tu lu? français, anglais, ou espagnol?
    Je vous embrasse

    1. Pour les espaces naturels, ça arrive ! La musique et la danse… je pense qu’on est passé à côté.
      Le livre je l’ai lu en langue originale, en français (il est à la médiathèque de Cuenca !).
      J’écris très bientôt la suite !

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